Télé Gaucho, sortie le 12 décembre 2012
Un film de Michel Leclerc avec Félix Moati, Eric Elmosnino, Sara Forestier, Maïwenn, Emmanuelle Béart…
Bande-annonce:
Synopsis:
Le film débute avec cette réflexion sur le cinéma, sur les caméscopes qui prennent la place des caméras. Plus petit, plus facile à utiliser, le caméscope permet à tous de filmer. Nous retrouvons ainsi un groupe formé de Jean-Lou, Yasmina, Victor, Clara, Adonis et bien d’autres qui ont pour ambition de filmer et faire de la mise en scène pour leur chaîne de télé, mais surtout pour changer le monde. Cette chaîne de télé, c’est Télé Gaucho, le produit de ce groupe qui se veut provocateur et qui s’oppose aux chaînes commerciales. Ainsi commence une aventure de cinq ans d’expériences diverses, de manifestations, et tentatives de diffusion illégale de leur chaîne, de longues soirées de visionnage de leurs exploits où se mêlent l’alcool, la musique, la chanson, les amours.
Mon avis:
Le film s’inspire directement de l’expérience du réalisateur Michel Leclerc -connu pour son film Le Nom des gens– à Télé Bocal, une chaîne de télé associative à laquelle il a participé entre 1995 et 2000. D’ailleurs, on se demande si certains moments dans le film ne sont pas réels, et en effet, le réalisateur qui avait déjà réalisé à partir d’archives personnelles un court métrage sur le sujet qui avait donné Le Poteau rose, a été encouragé par le succès qui en découle à puiser dans son univers personnel pour ses films. Victor, le personnage principal incarné par Félix Moati, réalisera aussi à la fin que sa vie personnelle est une immense source d’inspiration.
Le thème principal c’est bien cette expérience de groupe, et Victor gère mal sa relation à ce groupe, auquel il désire tant appartenir et auquel il se détache simultanément. Victor découvre dans ce récit la télé, et le film met en avant certaines rubriques de Télé Bocal comme « Avant, moi je croyais » ou « Les objets qui nous font chier ». La première rubrique est en réalité une vraie rubrique que Michel Leclerc réalisait pour Télé Bocal. D’ailleurs, le réalisateur se compare personnellement au personnage, Victor, qu’il considère plus « pur » que lui, car ce dernier refuse que l’on achète ses idées. Il y a dans le film une réelle réflexion sur la notion de création. Ce statut d’auteur ne peut être assumé dans ce milieu gauchiste à Télé Bocal. On revient à cette notion de groupe qui veut que tout travail soit attribué à un collectif. D’ailleurs, Victor sera constamment critiqué par le groupe car il a idées personnelles, et il n’est pas le seul. Le personnage d’Etienne, qui critique lui-même Victor, est aussi un exemple de ce paradoxe, incarnant celui qui se sent complètement gauchiste, mais qui ne l’est pas totalement en cachant le fait qu’il vient d’une famille bourgeoise à Auteuil.
Le groupe, c’est un ensemble de personnages complètement déjantés. Parfois, tout le monde parle et crie en même temps, ce qui provoque un vrai chaos, comme la nature de tout ce qu’ils vont entreprendre. Jean-Lou (Eric Elmosnino) est le meneur du groupe, celui qui encourage les autres, mais aussi celui qui fait tout échouer. Yasmina (Maïwenn) est quand à elle totalement engagée dans ce groupe, excessivement, puisque pour elle Télé Gaucho est le moyen de transmettre des idées fondamentales aux gens. Ces deux personnages forment un couple explosif. Le personnage de Clara (Sara Forestier) est probablement celui qui suscite le plus d’interrogations. On n’arrive pas à la cerner, même si dès le départ, on perçoit que cette fille qui pose comme morte sur les cadres du magasin de pompes funèbres, n’agit pas normalement. Elle ne fait pas la différence entre la fiction et la réalité à un tel point qu’on ne sait pas si elle fait semblant ou pas. Son personnage peut susciter un comique de situation, mais elle provoque aussi un sentiment d’incompréhension et d’inquiétude.
Si c’est bien l’histoire d’un groupe qui est illustré dans Télé Gaucho, le personnage de Victor s’en détache. On découvre le film à travers ce jeune homme qui quitte le foyer familial pour découvrir la vie dans la capitale et la liberté (qu’il exprime souvent à travers la nudité). Il découvre surtout le monde des médias, apprend à mieux cerner ses ambitions et connaît l’amour et le désenchantement; c’est un récit de son apprentissage qui nous est proposé. En contraste avec ce groupe, Victor est le personnage auquel le spectateur s’accroche car il représente d’une certaine manière l’individu « normal », et c’est aussi dû à cet aspect qu’il ne s’intègre jamais totalement au groupe. Il se retrouve surtout dans une situation complexe où il doit choisir entre Télé Gaucho et une chaîne commerciale qui lui permet de voir un autre aspect de la télé. La question cruciale qui se pose c’est de savoir s’il doit abandonner son ambition pour conserver ses convictions. D’un côté, on a ce groupe qui croit fermement en leurs idéaux mais avec des personnages qui sont complètement loufoques et irresponsables, et d’un autre on a le personnage de Patricia Gabriel (Emmanuelle Béart) qui incarne la réussite mais qui avoue ne pas faire ce qu’elle souhaite de sa vie.
Si on a l’impression que c’est un film engagé, mettant en avant le travail des militants, ceux-ci sont par moments tellement excessifs par leurs actes que finalement le film ne prône pas de morale. Par ailleurs, la présentation du récit peut surprendre, car il n’y a pas d’intrigue, le film suit simplement le cours des événements dans ce milieu libertaire gauchiste. Certains enregistrements sont réels (comme la manifestation des sans-papiers), d’autres ont été tournés incognito lors de vraies manifestations (comme la Gay Pride), et on découvre ainsi ces rubriques en même temps que la réaction du public réuni dans ce quartier du 20ème arrondissement, devant lequel sont diffusés les enregistrements le soir. Télé Gaucho rappelle l’ambiance des années 70, donnant l’impression d’un monde lointain, sauf que ce n’est plus la politique qui est l’ennemi à abattre, mais le pouvoir de la télé commerciale. C’est un film drôle, avec des personnages paradoxaux, teinté de mélancolie. Que pensez-vous de cette critique de Télé Gaucho? Ce film vous tente-t-il?
Cinéma / musique, Loisirs | 2 commentaires |
Marinouaustralie
J’avais vu « Le nom des gens » et j’avais moyennement aimé … Pas certaine d’aller voir Télé Gaucho ! nous verrons bien, selon les critiques presse!
Aicha
Parce que ma critique ne suffit pas? 🙂 Je pense être objective, quand je n’aime pas, je le dis.